Richard BORDES


Franc-maçon depuis plus de vingt ans, Richard BORDES fait partie de l’aéropage de recherches Sources qui dépend du Grand Collège des Rites Ecossais, Suprême Conseil du 33e Degré en France, Grand Orient de France.

Il est aussi l’initiateur et le co-organisateur des Biennales du Livre Maçonnique de Périgueux.

Il est l’auteur du livre Les origines anglaise de la franc-maçonnerie moderne, aux Editions Maïa, collection Savoirs partagés.

En Angleterre, le siècle des Lumières prend racine dans le dernier tiers du XVIIe siècle et dans la pensée de savants tels que Francis Bacon (1561-1626), Thomas Hobbes (1588-1679), John Locke (1632-1704), Isaac Newton (1643-1727). La poussée rationaliste qui s’exerce lors des révolutions de 1642 et de 1688 déclenche les grands mouvements idéologiques et les mutations philosophiques et scientifiques qui se développent au XVIIIe siècle, mais provoque en retour une lente érosion des dogmes religieux « […] au profit d’idées séculaires et hétérodoxes ». La franc-maçonnerie anglaise « moderne » apparaît dans ce contexte de libération de la pensée, entre l’atmosphère studieuse des sociétés savantes (Royal Society) et le bouillonnement intellectuel hétéroclite des coffee-houses londoniennes où se crée la première Grande Loge de Londres. En ce sens, on peut dire que la franc-maçonnerie moderne est bien davantage le produit du siècle anglais des Lumières que celui des anciennes corporations de maçons opératifs. Par franc-maçonnerie moderne, on entend celle qui, à partir d’une forme préexistante en Écosse et Angleterre, se constitue sous une forme radicalement nouvelle plus qu’elle ne se crée, à Londres, en 1717 selon l’historiographie classique, mais plus probablement vers 1721-23 selon certaines avancées convaincantes de la recherche récente.

On ne soutiendra pas dans ce travail que les francs-maçons anglais du début du XVIIIe siècle sont tous des satellites de la galaxie hétérodoxe – latitudinaires, déistes, antitrinitaires ou athées – mais à la lecture de certains articles des obligations du maçon inscrites dans les Constitutions d’Anderson (1723), qui soutiennent la pluralité des opinions religieuses, on n’est pas loin d’un libertinisme philosophique et érudit qui se développe rapidement en Angleterre et dont les deux points d’ancrage critiques sont « la morale et les dogmes chrétiens ». Le franc-maçon libertin, loin d’être interdit de loge, entend penser et agir par lui-même. Il ne renie pas d’emblée le christianisme, mais il commence à s’en éloigner.

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